« Gagner, ça n’est pas finir en première position, ça n’est pas battre les autres.

Gagner c’est se vaincre soi même, vaincre son corps, ses limites et ses peurs.

Gagner c’est se dépasser soi même et transformer ses rêves en réalité. »

Kilian Jornet

 

Mes objectifs sur cette dernière course de l’année étaient  : prendre du plaisir et finir en forme sans blessures !

A 48 heures du départ, une boule au ventre m’empêche de m’alimenter normalement et deux questions tournent en boucle dans ma tête : n’ai-je pas mis la barre trop haut ? N’ai-je pas présumé de mes capacités ? Malgré cela l’envie d’aller à ce rendez-vous fixé avec mon moi est très forte.

S’enchaînent alors le voyage, le passage sur le village , ou je croise Martine (ma grande sœur de cœur) qui tente de me faire sourire et Mathias avec qui nous parlons de la nuit qui nous attend ! Je récupère mon dossard, puis la journée se passe tranquillement, déjeuner, sieste, détente avec ma douce.

L’heure de prendre la navette arrive et avec elle ma première frayeur, en rade au pied du bus je ne trouve plus mon ticket, un vent de panique souffle dans mon dos. Après avoir retourné et  vidé mon sac sur le trottoir je retrouve enfin le sésame.

Saint-Étienne 30 secondes d’arrêt tout le monde descend, je rejoins  les copains Twittos dans le hall A (!) Sophie, Virginie, Marine, Paul et Mathias le tout orchestré par notre ange gardien 2.0 : le captain Marvin.

Discussions, collations et repos nous font passer le temps jusqu’au dépôt des sacs à la consigne, mais mon étiquette a disparue ou plutôt elle est restée sur le trottoir de tout à l’heure ! Deuxième frayeur et deuxième vent de panique !

Débarrassé de mon fardeau grâce à la gentillesse et l’efficacité d’un bénévole je me dirige doucement sur la ligne de départ, c’est à ce moment précis que je me décide enfin à me libérer, mieux vaut tard que jamais !

L’ambiance est intense, le silence nous gagne, je croise des regards mi -angoissés mi- enjoués, sous la houlette du speaker nous jouons avec nos frontales, formant ainsi un puissant halo contre l’obscurantisme, ce soir c’est aussi la fête des lumières.

Il est minuit et c’est parti pour 72kilomètres.

Tout de suite je mets en pratique la tactique qui doit me conduire à l’arrivée : qui va doucement, va longtemps, c’est à dire rester tranquille jusqu’au 40eme et accélérer après si j’ai encore du jus.

Les premiers kilomètres qui me font sortir de la ville sont plats et roulants, au bout d’une petite heure de course la première montée et les premiers sentiers arrivent, je ne me sens pas bien, des douleurs au ventre et une forte nausée gâchent mon plaisir et m’empêchent d’avancer, mais je tiens le cap et je m’accroche jusqu’à Saint Christo, premier ravitaillement Km15 il est 2h.

Pensant que mes nausées sont liées à la boisson énergétique (pourtant testée), je décide de vider mes gourdes et de tourner à l’eau claire, mais impossible d’approcher des tables, tellement il y a de monde dans cette petite tente, et au bout de 15 minutes j’accède enfin à un robinet !

Je repars confiant, et reprend ma place dans ce long serpentin lumineux grimpant les côtes et dévalant les pentes, tentant de relancer sur les portions plates, mais l’embellie est de courte durée et commence alors ma lente agonie intestinale !

Mon estomac est retourné et je commence à rendre très souvent, j’ai mal et j’enrage car la tête et les jambes vont bien. Je décide de marcher afin de ne pas trop perdre de force, tant pis si je perds du temps. Péniblement j’arrive à Sainte Catherine deuxième ravitaillement Km 28, je regarde ma montre il est 4h du mat !

C’est pire que tout à l’heure dans l’espace coureur, à tel point que je décide de partir rapidement, sans avoir bu ou mangé ! J’avance doucement dans la nuit, tordu par ces douleurs abdominales et les renvois de toutes parts ralentissent encore plus mon épopée, je me dit qu’il faut que je sois raisonnable, que ma santé est plus importante qu’un dossard et qu’au prochain arrêt j’abandonne, heureusement le spectacle est splendide, j’en profite pour admirer et prendre en photo les lumières des villes qui brillent en contre bas.

C’est dans cet état d’esprit que j’arrive à 6h40 à Saint Genoux le troisième ravitaillement au Km 40.

Là il y a moins de monde, j’accède enfin aux collations et boissons, je bois deux grands verres de coca et j’avale une banane, je prends mon temps pensant que je ne repartirai pas. Au bout de trente minutes je me sens mieux et je me dit » aller j’y vais au pire je m’arrête au suivant ».

Là au petit matin ça va bien, plus de maux de ventre, plus de nausées et le 40eme kilomètre est passé alors je fonce, je cours, je saute de pierres en pierres, je dévale les descentes boueuses et piégeuses, enfin je m’éclate enfin je trouve ce que je suis venu chercher : le plaisir.

J’avale ces 11 kilomètres en moins d’1h30 et j’arrive à 8h40 à Soucieu en Jarrest quatrième ravitaillement au Km 51.

Je suis en peine forme je décide alors de passer vite fait, juste le temps de ranger ma frontale, d’avaler un verre de coca et je repars.

A partir de là les kilomètres défilent vite, aider en cela par de moindres difficultés, j’entame ma chevauchée fantastique, je commence à sortir de ma concentration et à penser à l’arche d’arrivée que j’ai aperçue hier, comment vais je fêter son passage ? Je pense à mon amour qui doit se préparer à rejoindre elle aussi la Halle Tony Garnier.

Il est alors 10h20 et j’arrive à Chaponost cinquième et dernier ravitaillement au Km 61.

Je ne fait que traverser le gymnase qui sert de lieu de pause, je jette un œil à ma montre et en pleine confiance je passe un message à ma chérie pour lui indiquer que je serai finalement au rendez vous avant midi ! Ça c’était sans connaître les dernières difficultés du parcours final !

Je me lance alors dans ce dernier tronçon bille en tête, je tiens un rythme rapide jusqu’à la montée de l’Aqueduc Romain, que j’aborde en courant, mais elle est terriblement longue et pentue, mes cuisses brûlent de douleurs et se tétanisent au point que je dois ralentir et même m’arrêter. Je me suis enflammé un peu tôt et je vais le payer. A partir de là il ne me sera plus possible de reprendre un rythme de course, c’est la première fois que le mental flanche un peu , il me reste 5 km et je ne serai pas à l’heure au rendez-vous de midi, je suis déçu et en colère après moi, je peste contre ce final casse patte et sans intérêt, je dévale les 200 marches, je traverse le pont Raymond Barre et je passe sous l’arche tricolore, je suis Finisher en 12h23 de ma première SaintéLyon ! J’ai gagné, je me suis dépassé, je me suis trouvé et j’ai tenu mes objectifs.

Je voudrais remercier, toutes les personnes qui m’ont encouragé et soutenu, mon nouvel entraîneur Jean Marc Touré et surtout ma compagne qui accepte ma passion et me la laisse vivre…